25 juin 2007

Ani lo yashen (je ne dors pas)

Je me couche après avoir vu le soleil resplendir déjà sur les Invalides et l’esplanade déserte d’un dimanche de touristes et si je me réveille au goûter c’est pour passer mon après midi à pleurer sur des épaules absentes et sur mon foie retourné, mes poches sous les yeux comme des cloques de grand brûlé. Pour la sécurité sociale je prépare des forêts entières de photocopies inutiles dont au dernier moment il manquera toujours une même quand il n’y aurait plus d’arbres sur le fleuve Amazone, pendant que sur internet j’offre des yaourts aux miel à des garçons conceptuels et que parfois tard au téléphone je leur sers de Macha Béranger, on m’appelle de loin et je prends ma plus belle voix de baklawa velue, dans la nuit. Je ne veux plus voir les informations à la télé, ces laboratoires pharmaceutiques milliardaires faisant des procès à des associations de malades, ces caméras partout, voir jusque dans nos riches terres ceux qui trébuchent être un par un culpabilisés et punis. Cette nuit je voudrais qu’on me laisse tranquille survoler en rêve la ville blanche des aghlabides, et sur son cheval en bas mon arrière grand-père, sa chéchia vermillon, les enfants qui courent, les rues muettes, les toits écrasés de lumière, Kairouan. Mais au sommeil je me sens encore si lourd de colères, d’anafranil et de choléstase hépatique, je regarde sans comprendre l’image renvoyée par ma webcam, et que je reconnais à peine : ma vieille bio-masse.