31 juillet 2016

Réaction locale étendue (Chinkungunya)

Après nos journées remplies de virées chez Ikea et de grandes surfaces d’électroménager, ou passées entre nos ventilateurs et nos nouvelles étagères, B. m’emmène manger au pied de l’ossuaire de Solférino, et le soir sous la lampe et pour digérer ces gnocchis faits de vieux pain rance mis à tremper dans le bouillon et qu’on ne trouve qu’ici, je lis ces histoires sur la truie infanticide de Falaise, attachée à une claie, mutilée et trainée demi-morte, en 1386, devant les paysans et leurs cochons réunis, jusqu’à la potence.
Depuis que je me suis installé, les moustiques ne me laissent pas un centimètre de peau indemne, je ne suis que prurit, papules bulleuses, croûtelles et vésicules cutanées.
Le samedi les petites routes qui nous conduisent en fin de journée a travers la plaine vers cette fête de campagnards barbus et de garçons sensibles, placée sous le signe de la chouette effraie, dans le bar en bois près de l’étang, que M. et F. ont pavoisé de fanions pastels et de tentes dressées au milieu des anciens marécages.
Près du vieux manège à chevaux, dans cette soupe de moustiques-tigres et sous les arbres, danser sur Caterina Caselli et Sisters of Mercy pieds nus sur les pierres, une valse de la dengue et du virus zika.
En rentrant dans la nuit sur l’autoroute, d’avoir trop dansé sans doute, ou d’une incompatibilité entre la bière et nos beignets à la mortadelle, B. est au bord du malaise et fait un vertige au volant, il est tout blanc, nous nous arrêtons à l’auto-grill le plus proche pour qu’il se reprenne, je lui achète de l’eau fraîche et je lui dis bois lentement, bois lentement et respire, puis, derrière un camion qui brinquebale dans le noir, nous roulons à cinquante sur la file de droite jusqu’à la première sortie à l’ouest du lac, nous répétant tous les cent mètres a voix haute que nous sommes bientôt arrivés.

Le matin devant mon café, compter sous les doigts les piqûres le long de mon dos, sur mon crâne, mes mollets  et jusqu’autour du nombril.